Droit fiscal

Risques et limites de l’optimisation fiscale : ce qu’il faut éviter

Risques et limites de l’optimisation fiscale : ce qu’il faut éviter

Risques et limites de l’optimisation fiscale : ce qu’il faut éviter

La planification fiscale, levier incontournable de la gestion patrimoniale et entrepreneuriale, permet d’ajuster la charge fiscale dans le strict respect de la législation en utilisant par exemple les dispositifs existant, mais elle comporte des risques et des limites qu’il est essentiel de maîtriser pour éviter tout rehaussement ou contentieux fiscal. Dans un environnement juridique et réglementaire en constante évolution, les particuliers, sociétés et investisseurs — qu’ils interviennent en France ou à l’international — sont régulièrement confrontés à des choix structurants pour organiser leur fiscalité, que ce soit à travers la sélection du bon dispositif (régime mère-fille, intégration fiscale, holding animatrice, Pacte Dutreil…). Cependant, toute stratégie d’optimisation fiscale, même parfaitement légale, doit être déployée avec vigilance, afin d’éviter des montages que l’administration pourrait requalifier, au regard notamment des années de prescription, des redressements portés par la procédure de l’abus de droit fiscal (article L64 du Livre des Procédures Fiscales), ou du refus de certains avantages fiscaux en cas de non-respect des conditions requises.

Prenons l’exemple classique d’une société souhaitant réduire son imposition sur les bénéfices : le recours à une société mère permettant de bénéficier du régime mère-fille (art. 145 et 216 du CGI) tend à exonérer jusqu’à 95% des dividendes remontés, mais des conditions strictes de participation et de forme doivent être respectées, sous peine de redressement. Autre illustration : un particulier investisseur immobilier optant pour le régime du micro-foncier (si ses revenus fonciers n’excèdent pas 15 000 € par an selon la déclaration 2042), risque de perdre cette option en cas de présentation inexacte ou d’omission d’autres revenus imposables. Pour une analyse fine des dispositifs fiscaux, n’hésitez pas à consulter également notre département Droit Fiscal.

Ainsi, la frontière entre optimisation fiscale légitime et abus de droit fiscal est parfois ténue. L’administration fiscale — soutenue par la récente évolution de la jurisprudence et la transposition des directives européennes (notamment ATAD et DAC6) — accentue ses contrôles sur les schémas considérés comme artificiels ou ayant pour “motif principal” l’économie d’impôt. À compter de la déclaration de revenus 2024 (déposée au plus tard le 23 mai ou le 6 juin 2024 selon votre département), il importe par exemple de signaler l’existence de comptes à l’étranger et d’actifs numériques via les formulaires 3916 ou 3916 bis, sous peine de sanctions pécuniaires lourdes.

Chez NBE Avocats, nous accompagnons nos clients vers une optimisation fiscale efficace et sécurisée, parfaitement conforme aux exigences du droit en vigueur. Toutefois, il est crucial de rappeler que chaque situation est unique ; le présent article a pour vocation exclusive d’informer sur les grandes tendances et précautions à observer en matière d’optimisation fiscale. Pour toute application à votre situation particulière, ou pour bénéficier d’une stratégie sur mesure, nous vous invitons à prendre rendez-vous avec l’un de nos avocats fiscalistes.

Pour découvrir l’ensemble de nos domaines d’intervention, rendez-vous sur notre page d’accueil.

Comprendre l’optimisation fiscale : définitions, enjeux et cadre légal

Notion d’optimisation fiscale : décryptage

L’optimisation fiscale désigne l’ensemble des pratiques et stratégies légales visant à réduire la charge fiscale d’une personne physique ou morale, tout en respectant les textes en vigueur. Il s’agit ainsi, en toute transparence, de profiter des dispositifs ou aménagements prévus par le législateur. L’optimisation se distingue clairement de la fraude fiscale, qui consiste à violer la loi, et de l’abus de droit qui se situe à la frontière entre la conformité et le détournement des textes dans un but exclusivement fiscal. La distinction fait l’objet d’un encadrement précis que vous retrouverez développé sur les ressources de Service-Public.fr.

L’optimisation fiscale porte sur divers impôts :

  • impôt sur le revenu (IR)
  • impôt sur les sociétés (IS)
  • contributions sociales (CSG-CRDS)
  • impôt sur la fortune immobilière (IFI)
  • droits de mutation à titre gratuit (DMTG)
  • fiscalité locale (taxe foncière, CFE…)

Elle concerne aussi bien l’imposition des particuliers que celle des entreprises, que leur activité soit nationale ou internationale.

Les finalités de l’optimisation fiscale

Optimiser sa fiscalité répond à plusieurs grandes finalités, toutes légitimes dans la gestion d’une entreprise ou d’un patrimoine :

  • Maximiser les liquidités disponibles en limitant la pression fiscale
  • Sécuriser la transmission de son patrimoine à moindre coût
  • Anticiper les évolutions fiscales nationales et internationales
  • Rationaliser les structures d’investissement, y compris dans le secteur numérique, une thématique sur laquelle notre cabinet dispose d’une expertise Droit NTIC

Cadre légal et distinction avec l’abus de droit

L’optimisation fiscale est strictement encadrée par la législation française, en particulier les articles du Code général des impôts (CGI) et du Livre des procédures fiscales (LPF). L’abus de droit fiscal, sanctionné par l’article L64 LPF, intervient pour contrer les montages n’ayant pour “motif principal” que l’évitement de l’impôt, sans substance économique sérieuse.

Depuis le 1er janvier 2020, la notion d’abus de droit couvre, au-delà des montages à but “exclusivement fiscal”, ceux à “motif principal fiscal”, élargissant ainsi considérablement le champ d’action de l’administration. Ce changement fait suite à la loi de finances 2019, renforçant la vigilance à adopter lors de la mise en place de toute stratégie fiscale.


Les principes de base d’une optimisation fiscale maîtrisée

Audit et diagnostic fiscal préalable

Toute démarche d’optimisation crédible débute par un audit fiscal complet :

  • analyse des revenus (salariaux, mobiliers, fonciers…)
  • inventaire patrimonial (immobilier, financier, professionnel)
  • répertorier les structures (SA, SAS, SCI, sociétés de personnes…)
  • identification des flux (dividendes, intérêts, plus-values)

Cet audit permet de cartographier les risques, d’identifier les régimes applicables, et de sélectionner les axes pertinents d’optimisation. Un professionnel compétent en fiscalité peut vous aider à fiabiliser ce diagnostic et, le cas échéant, défendre vos intérêts en cas de contentieux avec l’administration fiscale.

Exemple pratique : Prenons le cas d’un couple marié ayant 100 000 € de revenus nets catégoriels, détenant 2 appartements locatifs, une société civile immobilière (SCI) détenant un immeuble de rapport, et un portefeuille titres. L’audit fiscal pourra par exemple consister à revoir le régime fiscal de la SCI afin de déterminer s’il est pertinent au regard des objectifs patrimoine des contribuables et de leur pression fiscale actuelle.

Choix du régime fiscal adapté

L’optimisation fiscale s’accompagne par exemple du choix du meilleur régime déclaratif :

  • micro-foncier ou régime réel pour les revenus immobiliers ;
  • option pour l’impôt sur les sociétés ou maintien à l’impôt sur le revenu pour les sociétés civiles ;
  • régime mère-fille ou intégration fiscale pour les groupes de sociétés ;
  • choix du quotient ou de l’étalement pour les revenus exceptionnels (article 163-0 A du CGI).

Pour en savoir plus sur ces arbitrages, vous pouvez consulter le site officiel des impôts.

Chaque option répond à des conditions précises, et ses conséquences doivent être anticipées.

Illustration : Un bailleur dont les revenus fonciers bruts ne dépassent pas 15 000 €/an peut opter pour le micro-foncier avec un abattement forfaitaire de 30 %. S’il a d’importants travaux à déduire, le régime réel via la déclaration 2044-SPE sera préférable. L’arbitrage doit être effectué selon la nature des charges.

Structuration des actifs et des flux

Repenser la détention des actifs ou l’organisation des flux peut aboutir à une diminution substantielle de la charge fiscale, tout en veillant à éviter toute caractérisation d’abus de droit. La doctrine administrative fiscale est une ressource précieuse pour effectuer ces analyses.


Les outils et dispositifs d’optimisation fiscale pour les particuliers

Allégement de la pression à l’impôt sur le revenu

Utilisation des dispositifs de déduction et de réduction

Le législateur a prévu un nombre important de mesures destinées à encourager certains comportements :

  • Les dispositifs IR-PME “Madelin” : réduction d’impôt sur le revenu de 18 % (voire 25 % sous certaines conditions) des sommes investies dans le capital de PME, dans la limite de 50 000 € pour une personne seule, via la déclaration 2042 RICI ; pour plus de détails voir la page dédiée du site de Bercy.
  • FIP/FCPI : réduction d’impôt pour souscription à certains fonds d’investissement, à hauteur de 18 % à 25 % sur les versements (déclaration 2042 C).

À noter : ces dispositifs entrent dans le plafond global des niches fiscales fixé à 10 000 € par an.

Arbitrage des revenus, des plus-values et des cessions

Les contribuables disposent fréquemment de marges d’optimisation via le planning de leurs opérations, notamment en étalant la réalisation de plus-values mobilières ou immobilières afin de favoriser leur tranche marginale d’imposition.

Exemple : Un particulier cède un portefeuille d’actions avec 40 000 € de plus-value : s’il effectue la vente sur deux années distinctes, il pourrait limiter l’impact fiscal en “lissant” ses revenus imposables.

Optimisation de la fiscalité immobilière

Micro-foncier, réel ou LMNP : les grands arbitrages

L’investissement immobilier offre plusieurs options, telles que le régime réel d’imposition des revenus fonciers, le micro-foncier ou encore le statut de LMNP (loueur en meublé non professionnel), qui doit être déclaré sur des formulaires spécifiques.

Le cas des SCI – IR ou IS

Les titulaires de biens immobiliers en société civile immobilière (SCI) doivent arbitrer entre imposition à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés selon le choix de la structure. Cela impacte la fiscalité à la fois sur les revenus récurrents et sur les plus-values en cas de cession.

Transmission patrimoniale et donations

Pacte Dutreil : anticiper la transmission de l’entreprise

Le Pacte Dutreil (articles 787 B et 787 C du CGI) permet, sous conditions strictes, un abattement de 75% sur la valeur des titres transmis (donation/succession) pour garantir la pérennité des entreprises familiales. Pour une information officielle sur ce dispositif, voir la fiche pratique de Bercy.

Exemple chiffré : Pour 1 000 000 € transmis via un Pacte Dutreil, seuls 250 000 € sont taxés au barème en vigueur, permettant d’exonérer presque totalement de droits de mutation la transmission d’une entreprise en ligne directe à deux enfants.

Assurance-vie et démembrements

L’assurance-vie demeure une enveloppe privilégiée pour la transmission, qui bénéficie d’abattements spécifiques et d’une fiscalité attractive.

Le démembrement de propriété (usufruit/nue-propriété) permet aussi d’anticiper la transmission et d’optimiser le coût fiscal.


L’optimisation fiscale des sociétés et entrepreneurs

Choix de la forme sociale : implications fiscales

Le choix du véhicule social impacte directement l’imposition des résultats, la fiscalité des plus-values, et la gestion des flux financiers — aspects détaillés sur notre page dédiée au Droit Fiscal pour les sociétés et entrepreneurs.

Utilisation des régimes spéciaux

Intégration fiscale et régime mère-fille

Les groupes de sociétés peuvent choisir :

  • Régime mère-fille (articles 145 et 216 du CGI) : exonération de 95 % des dividendes versés à la société mère, sous réserve d’une détention minimale de 5 % du capital pendant au moins 2 ans.
  • Intégration fiscale : imposition des résultats consolidés au niveau du groupe, permettant la compensation des déficits et optimisant la distribution de trésorerie.

Un recours à ces dispositifs nécessite une vigilance accrue concernant la substance économique du groupe, pour éviter tout risque de requalification fiscale.

Amortissements, provisions et déductions

La bonne gestion des amortissements comptables et des provisions permet de lisser l’assiette taxable sous réserve qu’ils soient justifiés dans leur principe et leur montant.

Optimisation de la rémunération du dirigeant

L’arbitrage entre rémunération (salaire), dividendes ou redevances doit se faire au regard de la législation sociale et fiscale en vigueur. Pour des simulations précises, il est possible de contacter le cabinet.


Optimisation fiscale à l’international : personnes physiques et sociétés

Fiscalité des flux transfrontaliers et conventions fiscales

Toute opération impliquant une dimension internationale doit s’inscrire dans le respect des conventions fiscales bilatérales signées par la France pour éviter la double imposition. La liste officielle est consultable sur le site des impôts.

Exemple : Un résident fiscal français percevant des dividendes d’une société luxembourgeoise devra remplir le formulaire 2047 et pourra, selon la convention, imputer l’impôt payé à l’étranger sur son impôt français.

Expatriation et choix du domicile fiscal

Changer son domicile fiscal implique diverses formalités dont la déclaration de transfert de domicile fiscal et la gestion de l’Exit Tax pour les entrepreneurs concernés.

Structuration internationale des sociétés

Nombre d’entrepreneurs souhaitent structurer leurs actifs à l’étranger, mais la conformité avec les obligations déclaratives (3916, DAC6…) ainsi que la réalité économique de la structure sont désormais surveillées avec attention par les autorités. Pour toute structuration internationale, l’appui d’un conseil expert comme un avocat fiscaliste est vivement recommandé.


La gestion fiscale des actifs numériques (cryptomonnaies, tokens…)

Rappel du cadre déclaratif et fiscal

Depuis l’entrée en vigueur de la loi PACTE et de la réforme du prélèvement forfaitaire unique (PFU), les plus-values de cession d’actifs numériques sont soumises à un régime spécifique. Pour tout savoir sur les formalités, consultez la page sur la fiscalité des crypto-actifs du site officiel des impôts.

Pour l’année 2024, le formulaire 3916 bis est obligatoire pour déclarer tous les comptes ouverts, détenus ou clos auprès de plateformes étrangères, sous peine d’amende.

Fiscalité applicable aux particuliers

Les particuliers sont soumis à une imposition séparée de 30 % sur les plus-values nettes lors de la cession de cryptomonnaies contre monnaie “fiat”.

Obligations déclaratives et précautions

Il est également important de veiller à bien différencier revenus occasionnels et professionnels, au risque sinon d’être requalifié en activité habituelle, soumise aux BIC.


Contentieux et sécurité juridique en optimisation fiscale

Les délais de prescription et risques de contrôle

En matière fiscale, les délais de reprise sont généralement de 3 ans, 6 ans ou de 10 ans en cas d’activité occulte ou d’absence de déclaration (article L169 LPF). Pour mieux comprendre les procédures applicables, consultez notre page Droit Fiscal.

Exemple : Omission de la déclaration d’un compte Binance à l’étranger en 2022 : l’administration dispose jusqu’à la fin de l’année 2032 pour engager des poursuites, outre la sanction financière automatique.

Abus de droit fiscal et schémas à proscrire

L’administration peut appliquer la procédure d’abus de droit si le montage est artificiel et n’a qu’un but principalement fiscal. Pour recentrer votre stratégie sur une gestion saine du risque, notre équipe vous accompagne adapté à chaque situation.

Sécurisation des schémas : rescrit, documentation et veille

La demande de rescrit fiscal et la constitution d’une documentation exhaustive (comptable, juridique, économique) sont des outils précieux pour sécuriser toute démarche d’optimisation. L’actualité fiscale peut vous éclairer sur les dernières évolutions.


Les étapes incontournables d’une bonne optimisation fiscale

  1. Diagnostiquer la situation patrimoniale, personnelle et professionnelle (audit exhaustif)
  2. Comprendre les dispositifs et régimes applicables à chaque typologie de revenus et d’actifs
  3. Identifier les opportunités pertinentes au regard des objectifs poursuivis (croissance, transmission, sécurisation du capital…)
  4. Composer une structuration efficiente des flux et des entités, sans prise de risque excessive
  5. Mettre en œuvre les obligations déclaratives exactes dans les délais (2042, 2044, 3916, 3916 bis, 2072…)
  6. Sécuriser sa démarche via l’appui de professionnels spécialisés, la sollicitation d’un rescrit ou la consultation de la doctrine administrative
  7. Actualiser régulièrement sa stratégie, notamment en cas de modification de la législation ou de changement dans la situation personnelle ou économique

Focus calendrier : principales obligations déclaratives 2024

  • Déclaration d’ensemble des revenus 2023 (formulaire 2042) : date limite selon département entre le 23 mai et le 6 juin 2024 (papier/ligne)
  • Déclaration de revenus fonciers : 2044 et 2044-SPE à joindre à la 2042
  • Déclaration des SCI : formulaire 2072 avant le 2 mai 2024 pour les SCI à l’IR
  • Déclaration des comptes à l’étranger (3916) et comptes d’actifs numériques (3916 bis) : même échéance que la déclaration de revenus
  • Déclaration des plus-values mobilières ou cryptos : 2042 C (annexe)
  • Déclaration d’ensemble ISF ou IFI : date limite selon département et mode de dépôt

Le respect de ces échéances est impératif pour garantir la validité de l’optimisation engagée. Pour faire le point sur vos démarches, un contact direct avec notre cabinet est toujours possible.


Le contenu ci-dessus a vocation purement informative. NBE Avocats recommande à toute personne désireuse de mettre en place une stratégie fiscale personnalisée de consulter un professionnel, notamment pour obtenir un audit de situation, éviter les schémas contestables et sécuriser l’ensemble des opérations envisagées.

A propos de l'auteur
Maitre Nadine Boumhidi
Nadine Boumhidi Avocate associée

Maitre Nadine Boumhidi

Avocate au barreau de Paris, Maître Nadine Boumhidi est titulaire d'un Master  2 en Droit Fiscal à l'Université Paris 1 Panthéon Sorbonne.

Pendant près de quatre ans, elle a pratiqué la fiscalité et le droit des  affaires, notamment au sein de Coca-Cola Entreprise et d’EY Société d'avocats,  avant de créer son propre cabinet en 2019.

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