Management fees : ce qu’il faut savoir sur leur déductibilité fiscale en 2025.Les frais de management intragroupe sont déductibles s’ils correspondent à des services réels, utiles à l’entreprise, facturés à un prix de pleine concurrence et correctement documentés. À défaut, l’administration peut en rejeter la déduction, requalifier la facturation (prix de transfert) et appliquer intérêts et pénalités. Cet article propose un guide pratique, à jour 2025, pour sécuriser la déduction, la TVA et les obligations déclaratives. Contenu informatif uniquement — pour un diagnostic personnalisé, prenez rendez-vous avec le cabinet.
En bref
- Déduction admise si: service réel et spécifique, intérêt de l’entreprise, prix de marché, justificatifs probants (contrats, livrables, clés d’allocation).
- Prix de transfert: privilégier le cost-plus avec clés objectivables; documenter le benefit test; pas de “safe harbor” légal en France.
- TVA: prestations de services généralement taxables; droit à déduction du holding selon l’étendue des opérations taxées.
- Déclarations clés: 2065 (IS) + tableaux 2058 pour réintégrations; 2257-SD pour les prix de transfert si seuils; échéances 2025 à anticiper.
- Risques: réintégration à l’IS (25%), intérêts (0,20%/mois) et pénalités; vigilance accrue en cas de flux transfrontaliers.
Définition et périmètre des management fees
Les “management fees” sont des redevances de services intragroupe facturées pour des prestations de direction, gestion, support ou assistance (finance, RH, IT, stratégie, juridique, conformité, achats, R&D non brevetée, etc.). Elles visent à rémunérer des fonctions centrales rendues par une holding ou une société mère à ses filiales, ou par une entité “shared services”.À distinguer: - Des redevances de propriété intellectuelle (royalties), qui rémunèrent l’usage d’un actif incorporel. - Des rémunérations de mandats sociaux (jetons de présence), régies par d’autres règles. - Des refacturations de coûts purs (disbursements) sans marge, si l’entité agissante agit en simple mandataire.
Conditions de déductibilité en droit français
Fondement légal et principes directeurs
La déduction des charges obéit aux règles générales de l’article 39, 1 du CGI (charge engagée dans l’intérêt de l’exploitation, se rattachant à une gestion normale et dûment justifiée). Pour les flux intragroupe, s’ajoute l’exigence du prix de pleine concurrence (article 57 du CGI) et, le cas échéant, des obligations documentaires renforcées.Références utiles: - Article 39 CGI (déductibilité des charges) — voir Legifrance. - Lignes OCDE 2022/2024 (services intragroupe, méthodes de prix de transfert) — OECD Transfer Pricing Guidelines.
En pratique, l’administration contrôle trois axes: réalité des services, utilité/avantage pour l’entité payeuse (benefit test) et montant non excessif au regard du marché.
Preuves à réunir (documentation probante)
Conservez, idéalement en français ou avec traduction synthétique: - Contrats de prestations détaillant périmètre, responsabilités, prix/marge, clés d’allocation, livrables, SLA. - Preuves de l’exécution: rapports, présentations, tableaux de bord, tickets IT, feuilles de temps, échanges structurés. - Clés d’allocation objectivables (chiffre d’affaires, effectifs, temps passé, actifs gérés) et leur justification. - Analyse de comparabilité (benchmarks) et/ou étude cost-plus; explication de l’absence de duplication avec des services locaux. - Politique de groupe (transfer pricing policy) et organigrammes fonctionnels.En l’absence de tels éléments, le rejet partiel ou total est fréquent lors des contrôles.
Prix de pleine concurrence et méthodes de refacturation
- Méthode classique: cost-plus (coûts directs + indirects pertinents) majorés d’une marge raisonnable pour la fonction prestée.
- Alternatives: taux forfaitaire adossé à des clés robustes; tarification par livrable si mesurable.
- Éviter: double facturation (si la filiale dispose déjà de ressources locales pour le même service) et marges élevées sans justification fonctionnelle.
Exemple: une centrale achats supporte 900 000 € de coûts éligibles. Elle refacture aux filiales sur la base d’un cost-plus 5% et d’une clé “volumes d’achats gérés”. Montant total refacturé = 900 000 € × 1,05 = 945 000 €, ventilé selon la clé.
Services à faible valeur ajoutée (simplification OCDE)
Les services routiniers de support (comptabilité, paie, IT de base, compliance standard) peuvent se prêter à une approche simplifiée de l’OCDE (coûts + 5%). La France n’a pas instauré de “safe harbor” légal: la marge de 5% n’est pas automatique, mais souvent admise si: - Les services sont effectivement rendus, non stratégiques et ne concernent pas l’IP. - Les coûts et clés d’allocation sont documentés. - Aucune duplication de services.
Points d’attention spécifiques (France / International)
TVA et statut des holdings
- Les prestations de management sont, en principe, des services taxables à la TVA (20% taux normal), lieu d’imposition déterminé par la règle B2B (client assujetti).
- Une holding “animatrice” ou “mixte” facturant des prestations à ses filiales peut déduire la TVA sur ses coûts, selon son prorata de taxation.
- En l’absence de facturation effective ou si la holding est purement passive, le droit à déduction de la TVA peut être refusé.
Exemple: la société mère facture 120 000 € HT de services à une filiale française → TVA 20% (24 000 €). Si la mère réalise uniquement des opérations taxées, la TVA amont sur ses coûts de management est intégralement déductible.
Prix de transfert et obligations déclaratives
- Documentation (LPF art. L.13 AA): requise pour certaines entreprises dépassant des seuils (notamment CA ou actif brut ≥ 400 M€, ou détention/contrôle par une entité dépassant ces seuils). En cas de défaut, pénalité de 5% des rehaussements (min. 10 000 € par exercice).
- Déclaration 2257-SD (prix de transfert): pour entreprises avec CA ou actif brut ≥ 50 M€, ou membres de groupes spécifiques. À déposer dans les six mois suivant la date limite de dépôt de la liasse fiscale (ex.: clôture 31/12/2024 → liasse début mai 2025 → 2257-SD début novembre 2025). Guide officiel: Déclaration 2257-SD.
- Déclaration pays par pays (2258-SD): pour groupes > 750 M€ de chiffre d’affaires consolidé.
Pour sécuriser ces volets, l’équipe Droit fiscal de NBE Avocats accompagne la mise en place d’une politique de prix de transfert et la préparation documentaire.
Paiements transfrontaliers et retenue à la source
- En principe, pas de retenue à la source en France sur des prestations de services B2B vers des pays conventionnés, si les services ne sont pas matériellement rendus en France. Vigilance toutefois sur l’article 182 B CGI (prestations réalisées en France par un non-résident).
- Risque accru avec les États et territoires non coopératifs (ETNC): non-déductibilité possible ou mesures aggravées.
- Toujours vérifier la convention fiscale applicable, les preuves de matérialité et la qualification des services.
Comptabilisation, formulaires et calendrier 2025
Comptabilisation
- Comptes usuels: 62 (services extérieurs: 6226 honoraires/consultants, 628 services divers) côté filiale; 706/708 côté prestataire.
- Justificatifs: factures conformes, contrats, ventilations et pièces d’exécution.
Formulaires et échéances (IS)
- Déclaration de résultat: 2065 + liasses 2050–2059 pour les sociétés à l’IS.
- Ajustements fiscaux: 2058-A (table de détermination du résultat fiscal) pour réintégrer d’éventuelles charges non déductibles; 2058-B pour les détails complémentaires.
- Délais: dépôt dématérialisé au plus tard le 2e jour ouvré suivant le 1er mai pour les exercices clos au 31/12; dans les trois mois de la clôture pour les exercices décalés.
- Prix de transfert: 2257-SD dans les six mois suivant la date limite de dépôt de la liasse.
Pour un audit pré-clôture ou un plan d’action, contactez-nous via la page Contact. Découvrez aussi notre expertise en Droit NTIC pour les contrats IT/Cloud qui sous-tendent souvent des services de management digitalisés. Présentation du cabinet: NBE Avocats.
Exemple chiffré (IS 25% en 2025)
- Situation: Filiale FR verse 300 000 € de management fees à sa mère UE (cost-plus 6%). Documentation complète (contrat, time sheets, benchmark) et benefit test établi.
- Effet fiscal: Déduction de 300 000 € → économie d’IS de 75 000 € (300 000 × 25%).
- Risque en cas de rejet (50% des frais jugés non justifiés): réintégration de 150 000 € → surcoût d’IS 37 500 €, plus intérêts de retard (0,20%/mois) et, le cas échéant, pénalités.
Check-list de clôture
- Confirmer l’existence et la substance des services (livrables, réunions, plans d’action).
- Vérifier les clés d’allocation et recalculer les bases de refacturation.
- Mettre à jour la note de politique de prix de transfert et l’analyse de comparabilité.
- Tester la cohérence TVA (lieu d’imposition, droit à déduction, prorata).
- Préparer les ajustements éventuels sur 2058-A et le calendrier 2257-SD.
Jurisprudence et positions de l’administration
La doctrine fiscale rappelle que les charges sont déductibles si elles sont engagées dans l’intérêt de l’entreprise et dûment justifiées (BOFiP — BIC, charges). En matière de services intragroupe, les décisions confirment régulièrement: - Rejet lorsque la prestation est insuffisamment documentée, redondante avec des fonctions locales, ou facturée selon une clé inadaptée. - Acceptation lorsque le contenu, le bénéfice concret et la méthode de prix (cost-plus raisonnable) sont établis et traçables.Les contrôles ciblent en priorité les frais “corporate” généraux, les mark-ups uniformes sans analyse, et les refacturations massives en fin d’exercice. Une documentation proportionnée et une gouvernance contractuelle robuste sont déterminants.
Cet article est fourni à titre informatif. Il ne constitue pas un conseil fiscal. Chaque situation requiert une analyse dédiée. Pour un accompagnement, prenez rendez-vous avec NBE Avocats.
FAQ
Les management fees sont-ils toujours déductibles en France ?
Non. Ils le sont si trois conditions cumulatives sont remplies: la réalité des prestations (services effectivement rendus), l’intérêt de l’entreprise payeuse (benefit test) et un prix conforme au marché (pleine concurrence). Il faut aussi une documentation probante: contrats, livrables, clés d’allocation, calculs de coûts et de marge. À défaut, l’administration peut réintégrer tout ou partie des charges et appliquer intérêts et pénalités. Un audit annuel de vos flux intragroupe permet de sécuriser la déduction et d’anticiper les risques.
Quel mark-up appliquer sur des services intragroupe “simples” ?
Pour les services à faible valeur ajoutée (support comptable, paie, IT de base, conformité), l’OCDE admet une approche simplifiée cost-plus 5% si les coûts sont éligibles et correctement alloués. En France, il n’existe pas de “taux légal” automatique: la marge retenue doit rester cohérente avec les fonctions, actifs et risques supportés. Un benchmark ou, à défaut, une justification qualitative du 5% est recommandé. Évitez les marges uniformes pour des services hétérogènes ou stratégiques sans analyse spécifique.
Quelles preuves l’administration attend-elle en cas de contrôle ?
Elle attend des preuves matérielles: contrats détaillant le périmètre, feuilles de temps, comptes rendus de réunions, plans d’action, tableaux de bord, tickets de support, livrables (rapports, outils), ainsi que la méthode d’allocation et le calcul du cost-plus. L’absence de duplication avec des fonctions locales doit être démontrée. Une note de prix de transfert dédiée aux services, mise à jour annuellement, facilite le contrôle et réduit le risque de réintégration.
Les management fees doivent-ils être facturés avec TVA ?
Oui, ce sont des prestations de services en principe taxables. Entre assujettis B2B, la TVA est due au lieu du client (mécanisme d’autoliquidation si le client est établi dans un autre État de l’UE). En France, le taux normal est de 20%. Le droit à déduction de la TVA amont chez le holding dépend de l’étendue de ses opérations taxées (prorata). L’absence de facturation effective peut conduire à un refus de déduction chez le holding et à des rappels chez les filiales.
Existe-t-il une retenue à la source sur des management fees versés à l’étranger ?
En principe non, sauf cas particuliers. Vérifiez: (1) où les services sont matériellement exécutés (risque d’article 182 B CGI si réalisés en France par un non-résident), (2) l’existence et la teneur de la convention fiscale (élimination d’une éventuelle retenue) et (3) l’absence de lien avec un État/territoire non coopératif (ETNC). Le plus sûr est d’anticiper la qualification, de réunir des preuves de matérialité et, si nécessaire, d’ajuster la chaîne contractuelle et la facturation.
À retenir
- Déductibilité conditionnée à la réalité, l’utilité et un prix de pleine concurrence, dûment prouvés.
- Méthode privilégiée: cost-plus avec clés d’allocation robustes; pas de safe harbor légal mais l’approche OCDE guide la pratique.
- TVA: facturation et droit à déduction à cartographier (holding animatrice/mixte, prorata).
- Obligations: liasse 2065/2058, 2257-SD (si seuils), documentation L.13 AA (si éligible).
- Risques: réintégrations, intérêts (0,20%/mois), pénalités; vigilance sur les flux transfrontaliers et ETNC.
- Besoin d’un audit de vos flux de management fees ou d’une mise en place de politique intragroupe? Contactez NBE Avocats ou notre équipe Droit fiscal pour sécuriser 2025.






